17/01/2023

En Tarn-et-Garonne, le directeur sur la sellette après 18 plaintes de salariés pour harcèlement sexuel.jpg

«Tu devrais me faire une pipe ça me détendrait et ça serait mieux pour toi (sic)?», «tu ne veux pas coucher avec moi, tu as un joli cul fais, moi, essayer (sic)», «tiens tu es à quatre pattes, on voit ton cul».
Tête baissée, Éric R., 56 ans, l’ancien chef du Bricomarché de Monteils, écoute sans rien dire à la barre du tribunal judiciaire ce 10 janvier, ce florilège de «bons mots» qu’il adressait, jour après jour, à ses salariées.
Dix-huit des 25 employés de l’enseigne ont déposé plainte pour harcèlement sexuel et moral pour des faits commis entre 1998 et 2019. Le cadre de l’enseigne a depuis été licencié par sa direction.
Le délibéré du procès sera rendu le 14 février Croquis d’audience Têti.
«J’espère qu’après tout ce que je viens de lire, vos arguments ont changé?, lui lance le président Emmanuel Abentin rappelant qu’à l’époque de la garde à vue du quinquagénaire, ce dernier avait parlé de «blagues grivoises», voire d’un complot orchestré par l’une des victimes.
— Je travaillais avec eux, j’étais le porte-clés, j’ouvrais et je fermais, relativise l’ex directeur très flegmatique.
— Enfin, vous aviez plus de responsabilités !», lui rétorque le juge revenant sur les trois volets qui lui sont reprochés : «l’autoritarisme», de la «xénophobie», et «le cœur du dossier des propos sexistes». N’obtenant pas de réponses circonstanciées, le président passe en revue chaque plainte.
«Lorsque Florence P. a été licenciée pour inaptitude et que cela a provoqué l’enquête de l’inspection du travail, elle a dénoncé votre comportement rabaissant et les propos à caractère sexuel à l’égard des autres salariées, insiste E. Abentin.
— Je ne comprends pas. Elle m’avait offert un gâteau pour mes 50 ans, se défend le quinqua balayant d’un revers de main des années où il humiliait sa collaboratrice devant tout le monde.
— Cette histoire d’uniforme avec ces propos sur leurs fesses où vous dîtes: «Tu as un beau cul dans ce pantalon», elles inventent?, enfonce le clou le juge.
— C’était à la cantonade, et aucun d’entre eux ne m’a rien dit.
— Vous êtes le chef du magasin, lui répond le président évoquant aussi des attitudes déplacées. «Des mains sur les hanches, la poitrine ou les fesses avec des billets de banque, indique le juge, ou encore lorsque vous demandez à une salariée blessée au genou de baisser son pantalon.
— Il faut détendre l’atmosphère, ne se démonte pas le prévenu disant n’avoir jamais mis une main aux fesses.
— Si c’est un complot, ils sont forts, s’agace Emmanuel Abentin.
— Qu’est-ce que voulez que je vous dise, je suis le méchant...
— En tout cas difficile de nous dire que c’était de l’humour !», tonne le juge pointant aussi des propos à l’encontre du mis en cause sur la pilosité et l’odeur des Portugaises «bonne qu’à passer le balai» ou des «gens des pays de l’Est qui foutent le bordel (sic)».
— J’ai plaisanté avec Isabelle, elle m’a même invité chez elle», assure le mis en cause. Le son de cloche est tout autre lorsque cette dernière dépose à la barre. «Il me disait que j‘étais bonne qu’à faire le ménage, il avait mis mon prénom sur la pelle et le balai», témoigne la salariée réclamant 7 000 € de préjudice comme trois autres plaignants.
«Il est trop facile de dire que c’était une plaisanterie!», tempête Me Jean-Louis Pujol demandant 5 000 € de préjudice pour sa cliente comme sa consœur Alexandrine Perez-Salinas.
Le substitut Cyril Padilla requiert 8 mois de sursis probatoire. L'affaire a été mise en délibéré au 14 février.